L’IFMAN Co à Madagascar
Une formatrice de l’IFMAN Co a réalisé des formations sur la communication non-violente pour des Malgaches, des Français et des Allemands dans le cadre d’une coopération de plusieurs ONG autour de l’agro-écologie. L’objectif était de faciliter la communication en tenant compte des différences culturelles.
Cette expérience fut riche de découvertes et de confirmations. Tout d’abord, nous avons bien une base commune en termes d’émotions et de besoins, et les exercices, jeux, apports de l’IFMAN produisent les mêmes effets (le fameux « Ah! ») qu’en France. C’est dans l’expression des émotions et des opinions que les différences culturelles se voient davantage.
Une exemple : la plupart des Malgaches des hauts plateaux, à l’intérieur du pays, sont tacitement tenus par un engagement à ne pas blesser l’autre, à sauvegarder les apparences d’une bonne relation. Ainsi, si quelqu’un est en désaccord avec une autre personne, il ne le dira pas mais ne fera pas ce qui est demandé, et l’autre ne le lui fera pas remarquer pour ne pas le vexer. On peut vite imaginer comme cette absence de parole sur les désaccords produit une difficulté réelle à coopérer ! Nous avons donc travaillé à trouver les mots, les tournures de phrases, les attitudes d’écoute pour faire émerger des paroles sincères afin de mieux travailler ensemble.
Autre exemple, repris par F. Trompenaars dans son ouvrage sur l’entreprise multi-culturelle : pour un Français ou un Malgache, il y a une forme d’unité de chaque personne. Ainsi, quand deux collègues sympathisent, il est courant qu’ils aillent ensemble boire un verre le soir et se voient régulièrement en-dehors du travail. Les Allemands voient en général les choses de manière plus cloisonnée : il y a vie publique et vie privée. Cela produit un rapport différent à la critique : un Allemand émettra facilement une critique directe sur une proposition ou un acte au travail, sans penser toucher la personne, alors qu’un Français ou un Malgache se sentira touché dans son identité et vexé dans son ego.
Ainsi, il fut assez étonnant de constater que sur bien des points, nous avons des manières de voir le monde plus proches de celles des Malgaches que de celles des Allemands…
Ces généralités sont bien sûr à prendre avec beaucoup de pincettes : elles doivent nous permettre de faciliter les relations sans étiqueter les personnes selon leur nationalité, en tenant compte par exemple des variations régionales et individuelles. On peut aussi faire référence au sociologue Iribarne, qui s’inscrit dans une démarche constructiviste, en proposant de commencer par définir ensemble les concepts avant de pouvoir en comparer les approches.
Au final, nous pouvons dire que ce qui a probablement le plus parlé à la cinquantaine de participants à ces formations, c’est de pouvoir aller « sur la colline de l’autre », pour comprendre son point de vue, ses émotions, ses besoins, en essayant d’adopter son cadre de référence, pour enfin rechercher ensemble des solutions. Quant à la formatrice, elle a désormais dans sa besace des tournures de phrases qui associent diplomatie et explicitation pour faire part de désaccords ou de points de vue différents !
Annie LE FUR, formatrice et coordinatrice.